Une 2ème grossesse est une joie inouïe pour le couple, cela laisse place à beaucoup de questions comme : Comment préparer mon aîné pour l’arrivé du deuxième bébé ? On a tendance à se préoccuper de ce volet-ci pour éviter toute éventuelle jalousie ou l’atténuer le plus possible.

Chaque bébé est différent en termes de tempérament, de personnalité …  Son âge reste un facteur déterminant afin de pouvoir adapter les meilleures méthodes pendant la grossesse pour aider l’aîné à assimiler que leur petit cocon familial attend un nouvel arrivant.


Pendant la grossesse

Pour ma part, j’ai voulu laisser un petit écart d’âge entre Mohamed Salman et le second bébé car j’estime qu’ils seront très complices dès le départ. Vu que nous sommes des parents qui sont pour l’éducation positive, on s’est dit qu’on allait utiliser une ou plusieurs méthodes douces pendant ma grossesse pour que mon aîné comprenne que nous attendions un deuxième bébé, et qu’il ne prendrait pas forcément sa place (les bébés auront tendance à raisonner ainsi).

Je suis tombée enceinte de Mohamed Yazan lorsque l’aîné avait 22 mois, c’était le 2ème plus beau jour de ma vie et j’attendais déjà mon accouchement avec impatience. C’est à ce moment où notre rôle préparatoire en tant que parents avait commencé vis-à-vis de Mohamed Salman…

On avait commencé par lui annoncer que j’étais enceinte et que cela voulait dire que maman avait un bébé dans le ventre, certes, il n’avait rien compris car ce n’était que le début de la grossesse et donc le ventre n’était pas visible, mais à force que le ventre s’arrondissait, il avait commencé à nous dire qu’il y a avait un bébé ici (dans le ventre). Je ne l’impliquais pas beaucoup au début pour ne pas le pousser à un traumatisme, mais quand j’ai l’occasion durant une lecture ou autre, j’essaie de choisir une histoire, une chanson, ou des illustrations où il y a des bébés.

Les visites chez le gynécologue avaient commencées et j’hésitais à emmener Mohamed Salman avec moi, je ne l’ai finalement pas fait. Par contre, il a pu faire connaissance avec son petit frère grâce à une échographie, à deux mois et demi de grossesse. Émerveillé par ce petit être sur une photo, il avait bien pris la chose. Désormais, à mon retour des visites chez le gynécologue, il demandait systématiquement à voir son « frère », j’étais rassurée. Nous avons par la suite adopté un simple rituel du soir, qui consistait en un bisou sur le ventre, lui souhaiter une bonne nuit et finir par une belle caresse, des fois mêmes m’arrive-t-il d’oublier mais c’est Mohamed Salman qui me rappelait gentiment à l’ordre. Il s’est senti tellement impliqué, qu’il me ramenait l’huile d’argan et me disait « Maman mets de l’huile sur le ventre pour mon frère ». Ces attentions particulières d’un petit garçon attentionné me chaviraient le cœur.

Nous sommes en cododo avec Mohamed Salman depuis ses 3 semaines, on a essayé de le mettre dans sa chambre à deux reprises mais il refusait même si on lui avait préparé une belle chambre à coucher. Ceci explique le fait qu’il ait toujours besoin de se sentir près de nous. On a donc décidé de le laisser à sa guise jusqu’à ce qu’il décide d’y aller lui-même, nous permettant de mettre Mohamed Yazan dans l’ancien lit à barreau dans notre chambre. J’avais beau entendre beaucoup de remarques dans ce sens, du genre «  Vous n’allez pas pouvoir équilibrer entre les deux dans la même chambre », «  Il est devenu grand, il faut absolument le mettre dans sa chambre », « C’est fou ce que vous êtes en train de faire » et j’en passe, mais je n’y prêtais pas attention car j’estimais que toutes les décisions qu’on entreprenait le papa et moi sont les meilleures pour de notre petite famille.

Malgré les symptômes sympathiques de la grossesse, nous n’avions pas renoncé à nos habitudes Mohamed Salman et moi, on sortait presque tous les après-midis pour aller jouer dans différentes endroits comme  Anfaplace, Morocco Mall, sur la côtière, chez les mamis, les cousins et aussi des activités à la maison telles que la peinture, la pâte à modeler, les légos, préparer des petits délices car c’est un bébé gourmet et gourmand, lire des histoires, apprendre de nouvelles choses en langue française (je lui parle en syrien, qui est ma langue maternelle et le papa lui parle en marocain, c’est une décision qu’on avait prise avant même sa naissance). En sortant, Mohamed Salman me demandait souvent de le porter et puisque je n’avais pas de problème dans ce sens-là, je le portais quand il le voulait pour ne pas qu’il se sente marginalisé. Ceci étant, avec la sciatique de la grossesse, et les problèmes de ligaments c’était difficile d’accepter vers 8 mois mais j’essayais de lui expliquer les choses calmement.

Plus l’accouchement s’approchait, plus je sentais cette relation fraternelle se construire petit à petit et j’étais très positive par rapport à cela. Bien sûr, Mohamed Salman m’aidait beaucoup à travers son comportement. D’après lui Mohamed Yazan faisait déjà partie de la famille puisqu’à chaque fois qu’on voulait sortir il nous disait :  « on va partir chez mami avec maman, papa, Salmanou et mon frère Yazan ».Il lui arrivait de venir vers moi pour parler avec son petit frère et lui dire « allez sors pour qu’on joue aux voitures », il attendait une réponse de sa part et c’était tellement mignon de voir ses réactions que cela me mettait les larmes au yeux à chaque fois (d’ailleurs je lui avait pris des vidéos qu’on regarde ensemble jusqu’à aujourd’hui).

Concernant le trousseau complet du 2ème bébé, Mohamed Salman n’a jamais été impliqué dans le processus de peur de le pousser à bout car ils sont très fragiles à cet âge-là et je l’ai donc éloigné de tout achat pour son frère. Mais au 9ème mois, en sortant tous les habits pour les laver, je les avais mis sur le lit et sorti de la chambre, quand tout à coup j’entends des « Wooow, ça c’est pour mon frère Yazan », « Woow ça c’est beau, zwine… », Mohamed Salman avait ouvert toutes les boites et trouvait ça beau, cela m’a encore rassuré, c’est tellement beau à voir et surtout à entendre.

Pourtant, il subsistait deux choses qui me taraudaient l’esprit… La première concernant l’allaitement, puisque je ne voulais pas que Mohamed Salman se dise un jour que son frère lui a pris sa tétée qu’il appelait « TANI ». Heureusement, un jour, il m’avait sorti : « Maman tani tani » et ce fut une occasion en or pour lui faire comprendre que lorsque son petit frère serait là on devra lui donner TANI pour qu’il boive du lait car il ne va se nourrir que de ça. Il accepta mais je ne savais pas s’il a vraiment été réceptif ou pas jusqu’au moment où, 4 jours plus tard, il m’a sorti : « Maman on va donner TANI à Yazan » et c’est là où je rebondis sur ce qu’il dit pour lui expliquer pourquoi on doit le lui donner. Une 2ème chose qui me tourmentait, était le fait de devoir passer 1 ou 2 nuits à la clinique loin de Mohamed Salman et puisque cela ne s’était jamais produit auparavant, je pleurais à chaque fois que je pensais à ça.

  • J’avais passé une merveilleuse grossesse en gérant à bien les sentiments de mon aîné pour pouvoir bien vivre le post grossesse. Mis à part un malheureux événement qu’on a vécu et qui m’avait beaucoup affecté : la perte de mon beau père que Dieu ait son âme, que j’aimais énormément puisqu’il était une personne unique, toujours à l’écoute d’autrui, aux petits soins…


Post grossesse

Le premier geste a été de lui acheter une bicyclette rouge le jour de mon accouchement. Ce n’était pas anodin car il l’avait « demandé directement » à son petit frère une semaine avant mon accouchement. Vu son âge (deux ans et demi à ce moment-là) il pensait vraiment que c’était Mohamed Yazan qui le lui avait offert et avait les yeux qui brillaient de joie.

Dans une ambiance festive, pleine de joie et d’amour, Mohamed Salman a fait la connaissance son petit frère le jour de sa naissance mais non sans quelques petites inquiétudes. La jalousie n’y étais pour rien mais le fait est que mon petit bou’tchou n’avait jamais vu une clinique et a donc été traumatisé du fait qu’il avait beaucoup de monde autour de sa maman, qui était sur un lit avec une perfusion au bras. Il disait sans cesse à son papa «  maman a didi sur la main ». D’ailleurs, plusieurs semaines plus tard, il me disait «  ne pars pas chez le médecin, il ne te fera pas didi ici sur la main ». Ces petites inquiétudes ont quelque peu entaché mon idéalisme quant à sa réaction à l’arrivée de son petit frère, mais cela s’est vite estompé quelques jours plus tard quand Mohamed Salman est entré dans la chambre et a demandé à ce que je lui épluche des fruits et lui donner à manger. Je retrouvais enfin mon bonhomme d’amour.

Le 3ème jour, nous étions de retour à la maison. C’était très spécial pour nous puisque ce fut la première fois qu’on allait se retrouver à 4 dans une même chambre, et on appréhendait un peu le comportement de Mohamed Salman. Il avait refusé de rentrer dans la chambre la journée, j’ai alors essayé de le soumettre sous un petit « test » en lui demandant de s’approcher pour faire bisou à Mohamed Yazan et il a répondu avec un NON catégorique. A ce moment-là, avec son père, nous prenons la décision de ne plus montrer qu’on lui accorde beaucoup d’attention au nouveau-né dans la présence de Mohamed Salman. Nous avons même demandé à notre entourage de ne pas comparer les deux car afin d’éviter des réflexions du genre  « tu ne veux pas me faire bisou ? Je vais demander à ton petit frère de le faire il est tellement plus gentil que toi… ». C’était une sorte de précaution afin d’éviter de  « traumatiser » notre petit Mohamed Salman. Afin d’assurer une transition en douceur, j’essayais de faire en sorte que le temps que je dédiais à Mohamed Salman ne s’amenuise pas au profit de son petit frère. J’aménageais donc mon quotidien dans ce sens : j’allaitais Mohamed Yazan, je le changeais et je sortais de la chambre pour faire des activités avec Mohamed Salman. Il est devenu plus demandeur qu’avant, en termes de jeux et d’alimentation, mais je m’efforçais à le satisfaire, et le papa également. De cette manière, nous voulions laisser Mohamed Salman venir vers son petit frère, et cela commençait à porter ses fruits, 2 jours après notre retour à la maison. A ce moment-là, un grand soulagement avait atterrit sur notre foyer et nous pouvions vivre pleinement un double voire un triple bonheur.

Le papa aussi a joué un rôle essentiel en faisant sortir Mohamed Salman pour que je puisse respirer un peu et surtout pour pouvoir m’occuper pleinement de Mohamed Yazan. Quand les deux frères sont réunis, j’impliquais l’aîné à prendre soin de son frère à travers plusieurs situations telles que le change qui a eu son succès. Jusqu’à maintenant, il  me rappelle des fois de le changer son petit frère et il me prépare tout ce dont j’ai besoin pour le changer. Il y a aussi le bain, un moment très intime pour les deux car il adore assister quand je lui donne un bain  au petit, il lui arrive même de préparer la sortie de bain en plaçant les habits sur le lit.

Même si vous avez peur qu’une jalousie s’installe entre les deux, retenez-vous de gronder l’ainé s’il s’approche du deuxième bébé. Au contraire, essayez de l’encadrer et le laisser lui faire des bisous sur la tête et sur les mains. J’ai testé à deux reprises de les laisser pendant 10 minutes ensemble, en m’éclipsant… Cette situation donnait généralement lieu à deux cas de figure : Dans le premier, Mohamed Salma s’approche de son frère et s’assure qu’il n’est pas réveillé ou qu’il n’a pas vomi, et il vient en courant pour m’e prévenir au cas où. Dans le deuxième, il ne fait pas attention et continue à jouer. Je pense que ces deux comportements sont dus au fait qu’il n’ait pas ressenti une différence après l’arrivée de son petit frère. Ça me réchauffe le cœur quand je vois les efforts que l’on fournit chaque jour, son papa et moi, ainsi que notre entourage porter ses fruits.

Une expérience pleine d’émotion, de joie, de bonheur qui aussi connu ses hauts et ses bas, car Mohamed Salman se tapait des petites crises de temps à autre (The terrible two, la fameuse crise des 2 ans), qu’on essayait de maîtriser tant bien que mal. Il m’arrivait certes de lui crier dessus en provoquant ses pleurs, car il n’était pas habitué à me voir dans cet état. Ceci étant, j’essayais de maîtriser mon cumul et de rester positive le plus possible pour ne pas affecter le bonheur qu’a été ma grossesse en gardant à l’esprit que la naissance reste une expérience humaine avant tout, car vivre la naissance d’un enfant est « notre chance la plus accessible de saisir le sens du mot miracle » (Paul Carvel)